Seuls les travaux d’aménagement devenus propriété du bailleur peuvent déboucher sur l’application du régime des locaux monovalents.
L’arrêt rendu le 21 mai 2014 par la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation combine, d’une part, la clause d’accession qui prévoit qu’à la fin du bail en cours le bailleur deviendra propriétaire des améliorations ou constructions réalisées par le locataire sans avoir à payer d’indemnité (i) et, d’autre part, le caractère monovalent des locaux loués (ii).
En l’espèce, un bailleur avait délivré au preneur un congé avec offre de renouvellement sollicitant le déplafonnement du loyer. Les parties s’étaient accordées sur le principe du renouvellement mais non sur le prix.
A l’appui de sa demande de déplafonnement du loyer, le bailleur invoquait la monovalence des locaux considérant que les aménagements opérés par le preneur avaient été spécifiquement réalisés à un usage industriel, notamment pour les besoins de son activité de mécanique de haute précision.
Le bailleur considérait que les travaux ainsi effectués par le preneur lui faisaient accession, qu’en conséquence les locaux étaient devenus monovalents et le loyer du bail renouvelé devait, par application des dispositions des articles L.145-36 et R.145-10 du Code de commerce, être fixé au regard des usages dans la branche d’activité concernée, de telle sorte que le plafonnement devait être exclu.
La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le bailleur.
Elle énonce que le bailleur ne peut se prévaloir, pour voir retenir la qualification de locaux monovalents, des travaux d’aménagement réalisés par le preneur que s’ils étaient devenus sa propriété. Ce qui n’était pas le cas en l’espèce.
Elle valide l’appréciation des juges du fond qui ont constaté que le bail prévoyait que les constructions nouvelles, travaux et améliorations quelconques faits par le preneur, n’accédaient au bailleur que lors de la sortie effective des lieux loués et, qu’en l’espèce, il n’y avait eu aucune sortie des lieux.
Est ainsi exclue la qualification de monovalence revendiquée par le bailleur.
Celui-ci avait vainement tenté une appréciation particulière de la notion et du régime des locaux monovalents en arguant de « l’aménagement » des locaux en vue d’une seule utilisation quand le texte légal ne vise expressément que « la construction » des locaux en vue d’une seule utilisation. Or, seuls les travaux d’aménagement devenus propriété du bailleur peuvent déboucher sur l’application du régime des locaux monovalents.
La demande de déplafonnement du bailleur aurait également été rejetée s’il s’était placé sur le terrain des améliorations apportées par le preneur aux lieux loués au cours du bail à renouveler ; la clause du bail de l’espèce prévoyant une accession lors de la sortie effective du locataire, c’est-à-dire à son départ des locaux loués.
Tant que les travaux effectués par le preneur ne sont pas devenus la propriété du bailleur, celui-ci ne peut en tenir compte dans le calcul du prix du bail renouvelé.
Il est donc extrêmement important d’être vigilant à la rédaction de la clause d’accession.
Si la clause reporte les effets de l’accession en fin de jouissance du preneur, tout déplafonnement en cours du bail est à exclure dans la mesure où l’accession est reportée au départ des lieux par le locataire. Si la clause prévoit en revanche que les améliorations et aménagements accéderont au bailleur « à la fin du bail » ou « en fin de location », le bailleur peut valablement invoquer les travaux réalisés par le preneur comme motif de déplafonnement, soit lors du premier renouvellement au titre d’une modification des caractéristiques des locaux loués, soit lors du second renouvellement au titre des améliorations.
En l’absence de clause d’accession, il est usuellement considéré que l’accession intervient à la fin du bail et peut entraîner le déplafonnement lors du second renouvellement.