Constitue un trouble manifestement illicite le comportement du distributeur consistant à déposer et/ou à reproduire des éléments distinctifs voisins du réseau auquel il est lié contractuellement, de sorte que le juge des référés est compétent pour faire cesser un tel trouble, au besoin sous astreinte.
La société X…, exportatrice et distributrice exclusive d’édulcorants sous la marque « X», a confié la distribution de ses produits en France à la société Y… Constatant des manquements de son cocontractant, la société X… a résilié le contrat de distribution avec effet sous un mois. Malgré cette résiliation, la société X… s’aperçut que la société Y… avait également violé la clause de non-concurrence et utilisait les signes distinctifs de la société X… en dehors des limites du contrat. C’est dans ce contexte que la société X… a saisi le juge des référés afin d’obtenir des mesures conservatoires et de remise en l’état pour trouble manifestement illicite. Après avoir saisi en vain le tribunal de commerce, la société X… a obtenu gain de cause devant la Cour d’appel de Paris. Les sanctions sont importantes mais évidentes.
Concernant la concurrence exercée par le distributeur Y… : alors que le contrat lui faisait interdiction d’entreprendre ou de participer à une activité propre à des produits concurrents de ceux qu’elle distribuait pour la société X…, la société Y… avait pourtant réussi à placer ses propres produits édulcorants dans la grande distribution et ce dans le même rayon que les produits « X ». On soulignera tout de même l’absence de clause de non-concurrence post-contractuelle relevée par la Cour faute de quoi la société Y… n’a pu être sanctionnée sur ce point.
Concernant l’utilisation fautive des signes distinctifs : la société Y…, en violation du contrat, s’est présentée à des magasins sous le nom « X / Y », a déposé deux marques fortement similaires à la marque « X » (dont une comprenait même le mot tout entier), a utilisé les signes distinctifs (marques, codes couleur, dessins, etc.) sur les emballages de ses propres produits et a cru bon de se présenter, auprès des professionnels et des consommateurs, comme l’inventeur de la molécule phare des produits édulcorants (alors qu’il s’agissait du Groupe X…) et comme le nouveau nom « plus court et plus facile à retenir » des produits anciennement « X ».
Les termes employés par la Cour sont lourds de sens (« cherchant à s’accaparer indûment la réputation », « dissiper au plus vite la confusion née », « inexécution flagrante du contrat », « la volonté de reproduire les éléments distinctifs des produits [X] a été si poussée que la société [Y…] n’a pas même hésité »), ce qui induit de lourdes sanctions (l’ordre de cesser ces agissements illicites sous astreinte de 20.000 euros par jour de retard, publication du dispositif de l’arrêt dans deux organes de presse professionnelle et deux organes de presse grand public ainsi que la publication de la décision sur la page internet de la société Y…).
Têtes de réseau : attention à déposer et à protéger contractuellement vos signes distinctifs !