Dans cette affaire, la Cour d’appel valide une clause de non-concurrence étendue à un rayon de 50 km et dépourvue de contrepartie financière, puisqu’elle concerne en l’espèce une société commerciale et non un salarié.
Avertissement : depuis la publication de cet article, le 1er juin 2013, la loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (dite « Loi Macron ») a introduit deux nouveaux articles au code de commerce (L.341-1 et L.341-2) concernant notamment le régime juridique des clauses de non-concurrence et de non-affiliation post-contractuelles : CLIQUEZ ICI pour une analyse d’ensemble des articles L.341-1 et L.341-2 du code de commerce, issus de l’article 31 de la loi Macron.
La SARL Qualité Service Propreté (QSP) a conclu un contrat de franchise avec la SAS France Restauration Rapide (FRR), laquelle avait développé un concept de restauration rapide sous l’enseigne « Pat à pain ». Concomitamment un bail commercial a été passé entre ces deux sociétés portant sur des locaux situés à Troyes, et propriété de la SAS FRR.
En 2004, la SARL QHS a racheté l’intégralité des parts sociales de la SARL QSP et suite à cette cession et au changement de gérant un nouveau contrat de franchise a été passé le 8 mars 2005 entre la SAS FRR et la SARL QSP prévoyant comme souvent une clause de non-concurrence applicable pendant la durée du contrat et une clause de non-concurrence post-contractuelle, ainsi rédigées :
« Article II – 21 : Consacrer pendant toute la durée du présent contrat en raison de l’exclusivité, dont il bénéficie dans un rayon de 500 m à vol d’oiseau de son lieu d’exploitation, son activité et son temps à la présente franchise ; ne pas, sauf accord écrit préalable du franchiseur, s’intéresser directement ou indirectement sous quelque forme que ce soit à la conception ou à l’exploitation de tout autre établissement. De même pendant une durée d’un an après l’expiration du présent contrat, pour quelque cause que ce soit, le franchisé ne pourra s’intéresser directement ou indirectement sous quelque forme que ce soit [à la] conception ou à l’exploitation de tout établissement de fabrication, de vente de produits alimentaires ou de restauration rapide d’une enseigne concurrente dans un rayon de 50 km à vol d’oiseau [du point] de vente existant de FRR ou de tout autre franchisé du groupe FRR ».
La SARL QSP a fait appel du jugement rendu le 15 mai 2012 par le Tribunal de commerce de Bourges qui, après avoir constaté que la société appelante a violé la clause de non-concurrence figurant au contrat de franchise pour la période du 20 septembre 2008 au 8 juillet 2009 et s’est rendu coupable d’actes de concurrence déloyale, a condamnée la SARL QSP à payer à la SAS FRR une somme de 453 150,39 euros à titre de dommages-intérêts.
La société appelante faisait valoir que la clause de non-concurrence reproduite ci-contre n’était pas licite car son périmètre d’application dans le temps ainsi que dans l’espace serait abusif en ne lui permettant pas de se rétablir et la privant de son fonds de commerce.
En premier lieu, l’arrêt commenté retient que la durée d’une année est parfaitement conforme à la jurisprudence habituelle en la matière ainsi qu’à la réglementation européenne (règlement numéro 4087-88-CEE du 30 novembre 1988), que d’autre part compte tenu des obligations prises par la SAS FRR dans ses différents contrats de franchise, cette dernière, qui fait bénéficier à ses franchisés de son savoir-faire commercial et technique, doit protéger les autres établissements franchisés, notamment celui de Saint Julien des Villas, situé dans l’agglomération troyenne, que la limitation de la clause à 50 km n’est nullement abusive, les clients satisfaits d’un point de restauration effectuent ce trajet pour suivre le déplacement de leur établissement conforme à leur goût dans un même département et qu’ainsi l’allégation de la privation de clientèle n’est donc pas fondée, d’autant plus qu’en réalité la durée de cette interdiction n’a été effective que du 20 septembre 2008, date de l’ouverture de l’enseigne « Aux charmilles », au 8 juillet 2009, date de la fin de la période d’application de la clause critiquée.
En second lieu, l’arrêt commenté souligne que l’absence de contrepartie financière à une clause de non-concurrence ne saurait en aucun cas entraîner la nullité de celle-ci, puisqu’elle concerne en l’espèce une société commerciale et non un salarié, que cette clause est par ailleurs légitime car elle est indispensable à la protection des intérêts de la SAS FRR, qui, comme cela a été rappelé plus haut, accorde à ses franchisés le bénéfice considérable de sa marque ainsi que de son enseigne « Pat à pain » particulièrement connue, de son assistance ainsi que de son savoir-faire, dont la qualité et l’attractivité financière ne sont pas discutées et que la société appelante en a bénéficié de 1992 à 2008 sans jamais critiquer la grande qualité de ces prestations.
A rapprocher : La clause de non-concurrence post-contractuelle dans les contrats de distribution (Panorama de jurisprudence et Prospective)