CA Paris, 2 mars 2016, RG n°13/23068
La demande de nullité d’un contrat de franchise pour vice du consentement et absence de cause s’apprécie in concreto. Le franchisé qui invoque au soutien de sa demande un consentement vicié pour défaut de remise d’état local du marché alors qu’il ressort du contrat qu’il a attesté avoir analysé le marché local et remis cette analyse au franchiseur, verra sa demande rejetée.
Ce qu’il faut retenir : La demande de nullité d’un contrat de franchise pour vice du consentement et absence de cause s’apprécie in concreto. Le franchisé qui invoque au soutien de sa demande un consentement vicié pour défaut de remise d’état local du marché alors qu’il ressort du contrat qu’il a attesté avoir analysé le marché local et remis cette analyse au franchiseur, verra sa demande rejetée.
Pour approfondir : En l’espèce, une société avait conclu un contrat de franchise pour une durée de cinq ans avec un franchiseur du secteur du conseil en gestion de patrimoine.
Un an plus tard, le franchisé signait une convention de commercialisation de ses prestations avec un fonds d’investissement, les commissions générées devant être intégralement reversées au franchiseur, à charge pour ce dernier de reverser les commissions générées à la société franchisée. Le franchiseur résiliait le contrat de franchise pour non-respect des obligations contractuelles plusieurs mois plus tard.
Le franchisé s’est vu assigner devant le tribunal de commerce de Paris et a invoqué en défense la nullité du contrat de franchise pour vice du consentement et défaut de cause. C’était l’arrêt dont il a été interjeté appel. Confirmant ainsi le jugement du tribunal de commerce de Paris, la Cour d’appel de Paris a écarté les moyens invoqués au soutien de la demande de nullité et rejeté la demande derechef.
Concernant le vice du consentement, le franchisé soutient que son consentement a été vicié en raison du défaut de présentation du marché local dans le DIP.
Si l’état local du marché a incontestablement toute son importance (CA Paris, 20 nov. 2013, RG n°12/10268), en l’espèce, il résulte des énonciations même du contrat de franchise que le franchiseur avait communiqué les éléments nécessaires à l’établissement du marché local propre à l’enseigne et que le franchisé avait analysé le marché existant sur la zone de chalandise et qu’il avait communiqué ladite étude au franchiseur. La Cour d’appel déduit exactement que, compte tenu des énonciations même du contrat de franchise, le consentement du franchisé n’a pu être vicié en raison d’un défaut d’état local de marché et rejette en conséquence le moyen. Et l’on sait que la Cour d’appel de Paris stigmatise souvent l’idée selon laquelle l’absence de communication d’un état du marché local n’implique pas nécessairement la nullité du contrat (CA Paris, 7 oct. 2015, RG n°13/09827 ; CA Paris, 17 déc. 2014, RG n°13/08615).
Concernant le défaut de cause, il est reproché au contrat d’être dépourvu de savoir-faire transmissible, élément essentiel du contrat de franchise. Cependant, la Cour d’appel a estimé que le savoir-faire éprouvé se manifestait à la fois dans la formation initiale et dans des manuels opératoires apportant des informations non connues du public sur le concept et que lesdits manuels ont été remis à l’issue de la formation initiale par le franchiseur, remplissant par là son obligation. Qu’en conséquence, le contrat litigieux n’était pas dépourvu de cause, la Cour d’appel rejette le moyen.
Par cette décision, la Cour d’appel a défini plus encore le prisme de la recevabilité des demandes de nullité des contrats de franchise invoquées par les franchisés. Dès lors qu’il est demandé au juge de se prononcer sur le vice du consentement ou la transmission du savoir-faire, celui-ci procède à une appréciation in concreto et stricte des causes de nullité soulevées. Il appartient au juge de se fonder d’une part sur la lettre même du contrat et des pièces versées au débat. Ainsi, en l’espèce, quatre volumes d’un manuel opératoire apportant des informations non connues du public sur le concept transmis au franchisé ont suffi à rejeter la demande de nullité fondée sur l’absence de cause.
A rapprocher : CA Paris, 7 oct. 2015, RG n°13/09827 et notre commentaire